vendredi 21 octobre 2011

Victor Hugo: réflexions sur la guillotine, Les Misérables... et 4 "dessins" de l'auteur.


          Quant à l'évêque, avoir vu la guillotine fut pour lui un choc, et il fut longtemps à s'en remettre.
          L'échafaud, en effet, quand il est là, dressé et debout, a quelque chose qui hallucine. On peut avoir une certaine indifférence pour la peine de mort, ne point se prononcer, dire oui et non, tant qu'on n'a pas vu de ses yeux une guillotine; mais si on en rencontre une, la secousse est violente, il faut se décider et prendre parti pour ou contre.
Les uns admirent, les autres exècrent.
La guillotine est la concrétion de la loi; elle se nomme "vindicte"; elle n'est pas neutre, et ne vous permet pas de rester neutre. Qui l'aperçoit frissonne du plus mystérieux des frissons.
Toutes les questions sociales dressent autour de ce couperet leur point d'interrogation.


L'échafaud est vision. L'échafaud n'est pas une charpente, l'échafaud n'est pas une machine, l'échafaud n'est pas une mécanique inerte faite de bois, de fer et de cordes.
Il semble que ce soit une sorte d'être qui a je ne sais quelle sombre initiative; on dirait que cette charpente voit, que cette machine entend, que cette mécanique comprend, que ce bois, ce fer et ces cordes veulent. dans la rêverie affreuse où sa présence jette l'âme, l'échafaud apparaît terrible et se mêlant de ce qu'il fait. L'échafaud est le complice du bourreau; il dévore; il mange de la chair; il boit du sang. l'échafaud est une sorte de monstre fabriqué par le juge et par le charpentier, un spectre qui semble vivre d'une espèce de vie épouvantable faite de toute la mort qu'il a donnée.
          Aussi l'impression fut-elle horrible et profonde, le lendemain de l'exécution et beaucoup de jours après encore, l'évêque parut accablé; la sérénité presque violente du moment funèbre avait disparu : le fantôme de la justice sociale l'obsédait. lui qui d'ordinaire revenait de toutes ses actions avec une satisfaction si rayonnante, il semblait qu'il se fît un reproche. par moments il se parlait à lui-même et bégayait à demi-voix des monologues lugubres .
En voici un que sa soeur entendit un soir et recueillit:
_ je ne croyais ps que cela fût si monstrueux. c'est un tort de s'absorber dans la loi divine au point de ne plus s'apercevoir de la loi humaine. La mort n'appartient qu'à Dieu . de quel droit les hommes touchent-ils à cette chose inconnue ?

LES MISERABLES, livre premier "un juste".



... et , en illustration, quatre  "peintures"  de Victor Hugo
qui en a dessiné ou peint plus de 3.500 !

2 commentaires:

  1. La mémoire des instruments de torture est palpable par exemple au musée de la Torture et de l'Inquisition à Santillana del mar.
    Des affiches indiquent que certains de ceux qui sont exposés, avec d'effroyables taches, servent encore dans certains pays!(La guillotine semblerait à côté au moins plus expéditive).
    Dans la cour se dressent des potences...
    Ames sensibles s'abstenir.

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  2. mais BADINTER est passé par là, et c'est bien.
    bisous de claudia

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